lundi 24 février 2014

Seconde main et volontariat

Comme nous l’avons déjà dit, il existe ici de nombreuses possibilités d’achat d’articles de seconde main. Ainsi, outre les sites Internet, on remarque notamment la présence des magasins St Vincent de Paul, l’Armée du Salut ainsi que l’Ecoshop, un hangar plein de bonnes affaires dont le slogan formé sur le zeugme « Save money and the planet » n’est pas sans me rappeler un certain professeur de français.

Le magasin City Mission de Bryndwr,
où je suis volontaire.
Les magasins chrétiens sont généralement liés à l’une ou l’autre organisation de charité qui porte secours à la veuve et l’orphelin, mais pas que. Leur bon fonctionnent repose principalement sur les dons, de biens et de temps, que de généreux donateurs leur accordent. Seuls les gérants reçoivent une maigre rémunération. Il s’agit donc d’entreprises dont le moteur est la solidarité et la volonté d’aider les autres.

Tout naturellement portée par ma bonté innée et mon adhésion au message chrétien, j’ai entrepris d’effectuer des démarches afin d’offrir un peu de mes compétences et de mon temps à la Christchurch City Mission, une de ces organisations chrétiennes, plutôt locale. Rendez-vous avec la gestionnaire des volontaires, documents à compléter pour vérifier que je ne me drogue pas, que je n’ai pas de casier judiciaire etc. Bref, le même type d’investigations que pour trouver un emploi ou une maison. Voilà donc que je preste trois heures chaque jeudi après-midi à un magasin de charité situé à quelques kilomètres de chez nous.

Les premières semaines, je me suis entrainée à indiquer les prix. On écrit sur l’étiquette la date, la taille du vêtement, le prix et éventuellement des informations importantes telles qu’un bouton manquant ou une matière noble. Et les difficultés arrivent très tôt ! Une petite liste vaut mieux qu’un long discours :

-          La taille des vêtements
Ici, point de 36 ou de 42 : on utilise les tailles anglo-saxonnes. On a donc des vêtements de taille 6 à 28. Après de nombreux tests empiriques, on peut en déduire approximativement que 6 = 36 = XS et 14 = 42-44 = M/L. Au-delà, c’est « hyper grand » et on ne prend plus vraiment la peine de faire la différence entre un 22 ou un 24… Si seulement c’était si facile ! Eh bien non, les Néozélandais sont plus corpulents que nous. Si un vêtement indique « S », soyez assurés qu’il est trop grand pour moi alors qu’en Belgique, je porte du S ou M. Voilà, vous connaitrez tous ma taille. Et je n’ai pas parlé des gens qui ont coupé les étiquettes, rendant le devinage quasi aléatoire.

-          Les prix et les marques
Les pantalons et jupes sont à $6.50, facile. Les tops, par contre, ça devient foireux. De base, ils sont à $4.50 ou $6.50 en fonction du type – que j’ai déjà du mal à déterminer – et ceux de la seconde catégorie peuvent aller jusqu’à $20 en fonction de la marque, de la matière et de l’originalité. Et c’est là que le bas blesse*. Pas de Pimkie, de Jennyfer, de Mango ou de Armand Thiery (ces marques ne m’ont pas payée pour les citer… je devrais le leur demander, tiens). Les marques sont ici chinoises ou australiennes, je n’en connais quasi aucune. Me voilà donc à brandir régulièrement un vêtement devant la gérante et demander si c’est une bonne marque ou pas. Ce à quoi elle répond souvent « Ah mais celui-là, il est joli ! On peut le mettre à $7… Oh, non, il est vraiment beau, $8. » De quoi m’aider à être capable de déterminer les prix toute seule comme une grande…


-          Les chiffres
Les premiers jours, il a fallu m’appliquer à écrire les chiffres. Pour mieux vous expliquer, vous trouverez ci-contre un comparatif de la façon d’écrire anglo-saxonne et la nôtre.


Ensuite, on m’a montré comment tenir la caisse, accepter les dons et ranger le magasin, chacune de ces activités ayant son lot de petits détails auxquels il faut faire attention :

-          La caisse
Finalement, ce n’est pas compliqué lorsqu’on suit les différentes étapes notées sur une fiche. Le souci, ce sont parfois les clients. « Oh, finalement, je ne prends pas ça. » et on essaie de se rappeler comment on retire un article. « Attendez, je vais chercher encore un truc. » Et on bloque la caisse pour le client suivant. « Vous pouvez me montrer ce bracelet ? Mmmh… et celui-là ? » Et on sort un à un tout le contenu de la vitrine. « Vous savez, j’ai étudié à Paris à la Sorbonne, je suis fascinée par Stendhal. » Et on écoute la vie de Stendhal en français pendant un quart d’heure. Oui, oui, c’est arrivé ! Bon, d’accord, ce n’était pas totalement inintéressant.

-          Le rangement
Vêtements triés par taille, par couleur
et du plus clair au plus foncé.
Les vêtements sont triés par type, par taille puis rangés par couleur. La gérante est aussi perfectionniste que moi. Mais encore une fois… les clients ! On sort un vêtement pour le regarder, On le remet à l’envers dans le rayon. Plutôt que simplement le raccrocher, ils passent le crochet en dessous de la tringle et le raccrochent par l’autre côté. Tout à fait logique et intuitif. Et tous le font ! Puis parfois, ils les rangent dans la mauvaise taille ou ne font pas attention aux couleurs. Ou bien ils bousculent un cintre, font tomber un vêtement et le laissent par terre.

-          Les dons
Il faut toujours interrompre son activité pour accepter un don, prendre les sachets et les mettre dans l’arrière-boutique tout en remerciant le donateur avec le sourire. Pas trop difficile… sauf qu’on n’accepte pas tout non plus ! La vaisselle, les télévisions, les matelas et autres encombritudes sont plutôt pour le magasin central. Il faut alors rediriger la personne vers le bon magasin, sachant qu’elle n’aura peut-être pas la patience de s’y rendre. Certaines personnes prennent la peine de laver leurs vêtements et les repasser avant de les offrir au magasin. Dieu les bénisse car, trop souvent, on reçoit des vêtements sales, parfois abîmés et pas triés pour un sou. D’accord, c’est notre boulot, mais quand même…

Dernier défi : surveiller les clients atteints de barakisme aigu qui viennent en famille semer la pagaille dans le magasin. Le gamin sort les jouets du bac et les sème partout. Les grandes regardent trois cents vêtements et les remettent n’importe comment dans le rayon. La mère marchande. Ils parlent fort, font plein de bruit, touchent à tout. Parfois, ils arrivent pieds nus et repartent avec des chaussures aux pieds. Un quart d’heure à garder un œil sur eux et faire semblant de ranger les rayons pour les dissuader de subtiliser quoi que ce soit, c’est aussi épuisant que trois heures normales.

On fait aussi dans les accessoires et le linge de maison.
Pour conclure, je ne peux que vous donner des conseils pour mieux respecter le travail de volontaires comme moi. A commencer par les dons que vous pouvez faire : avant d’offrir un vêtement, demandez-vous si vous le porteriez encore en l’état. Si non, mettez-le directement à la poubelle ou réutilisez le tissu. Puis, lorsque vous êtes dans l’un de ces magasins, veillez à remettre les vêtements tels que vous les avez trouvés ou, dans le doute, confiez-les à un volontaire qui les rangera lui-même. Merci pour tous les gens de mon espèce.


* Je n’ai pas commis une erreur orthographique mais réalisé un jeu de mots tout à fait prémédité, puisque l’on parle de vêtements.

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